Ces airs sceptiques, ces hésitations à venir participer, ces interrogations sur leur capacité à réaliser des choses manuelles, ces regards un peu inquiets en s’installant derrière la machine à coudre… Puis ces étonnements en appuyant pour la première fois sur la pédale, ces fou-rires devant ces premiers points un peu tordus, et finalement ces sourires, accompagnés d’une envie de continuer encore un peu. 🙂
Voici un petit résumé de ce projet un peu particulier, que je souhaite aborder par ici aujourd’hui. L’idée a émergé cet été et m’a ensuite occupé une bonne partie du mois d’octobre. Vous l’aurez peut-être deviné, il s’agit d’un projet réalisé à plusieurs, ou pour être exacte : réalisé à 29. Ce nombre me paraît tellement énorme. Je ne crois pas qu’en début de projet, j’aurai pu espérer qu’autant de personnes allaient se joindre à ce challenge. Mais c’est bien le cas, et c’est, je pense, ce qui lui donne encore plus de sens.
Tout à commencer en août dernier, un jour où nous discutions couture, avec une de mes collègues. A un moment, elle a eu cette belle idée : réaliser un cadeau fait-main à plusieurs pour la naissance du 3ième enfant d’une de nos collègues. J’ai tout de suite adhéré, me voyant bien organiser un atelier créatif. Je savais également que ce type de cadeau pourrait plaire à ma collègue enceinte, sensible au fait-main. Il fallait seulement trouvé un projet simple à coudre pour les débutants et surtout facilement réalisable à plusieurs.
Et puis, quelques jours plus tard, est arrivée cette idée.
Je me souviens encore du moment où ce projet s’est dessiné dans ma tête. Il était bien plus gros que l’idée de départ, mais tellement plus intéressant et challengeant.^^ J’ai eu envie de mettre au défi toutes les personnes qui souhaitaient participer au cadeau de naissance de ma collègue, en leur proposant de coudre ensemble une couverture. Bref en gros, je souhaitais mettre ma boîte à la couture, le temps d’un projet. Idée certainement très ambitieuse, car la majorité de mes collègues ne sait pas coudre, et surtout en cette fin d’année, la plupart d’entre nous a un emploi du temps bien chargé. Mais je me suis dit que justement, le temps accordé par chacun aurait bien plus de valeur, que de participer à l’habituel cagnotte. Et puis, entre nous, j’étais très curieuse de voir mes collègues passés derrière une machine à coudre (en mode, je vais bien me marrer! ;-)). Cela allait forcément être une jolie parenthèse.
– Le cadeau –
Pour revenir au cadeau en question, l’idée est venue en repensant aux couvertures aux 100 vœux (Bai Jia Bei), réalisées à l’occasion de l’arrivée d’un nouveau-né. J’avais notamment découvert cette jolie coutume chinoise, il y a quelques années, grâce à Lise Tailor. Trouvant certaines couvertures vraiment sublimes, j’ai choisi de m’en inspirer en proposant un atelier où le but serait d’assembler 100 carrés. Étant donné les contraintes de temps de chacun, et pour rendre l’organisation la plus simple possible, j’ai fait le choix de préparer les carrés à coudre à l’avance. Il faut dire aussi, qu’il est assez plaisant de choisir les différents tissus et surtout cela me permettait d’utiliser mes chutes (je n’ai pas eu besoin d’acheter des coupons pour faire le patchwork, j’ai tellement de restes en même temps…). Par conséquent, même si le résultat est, au final, assez proche d’une couverture aux 100 vœux, ce cadeau s’en éloigne un peu, étant donné sa réalisation.
– L’organisation –
La préparation des carrés fut certainement l’étape, qui m’a demandé le plus de temps. Je voulais proposé un maximum de coupons différents pour que chacun de mes collègues puisse avoir du choix. Pour cela, j’ai coupé environ 120 carrés de dimensions 12x12cm. Pour être précise et surtout pour gagner du temps, j’ai utilisé ma règle cutter (heureusement qu’elle était là, sans elle, cette étape aurait été vraiment fastidieuse^^ – si vous ne connaissez pas, ça ressemble à ça). J’ai principalement utilisé des coupons en coton type popeline, pour faciliter la couture. Mais j’ai tout de même craqué pour certains motifs trop mignon, notamment pour un jersey girafes, que j’ai du entoiler pour le stabiliser. Pour les couleurs, je suis partie sur des tons assez doux, autour du vert, bleu, jaune et gris.
En parallèle, les dates et horaires des ateliers ont été fixés : ils seraient réalisés pendant le temps de pause de midi. Après avoir fait de savant calculs sur le nombre d’heures nécessaires :-), j’ai proposé 4 ateliers de 1h répartis sur 2 semaines, avec un temps de couture pour chaque participant estimé à une dizaine de minutes. Au final, mes calculs étaient presque bons : une seule séance supplémentaire s’est avérée nécessaire.
Côté équipement, j’avais à disposition mes 2 machines à coudre. Comme il s’agissait de faire coudre des personnes totalement novices, il me semblait important qu’un accompagnateur soit derrière chaque machine pour guider les participants. Du coup, j’ai embauché l’apprentie de ma collègue enceinte (qui avait eu la bonne idée d’être styliste dans une ancienne vie 🙂 ).
Enfin, j’ai envoyé à tout le monde, une invitation expliquant la démarche et dont le but était surtout de les rassurer et de leur donner envie de participer.
– Le déroulement des ateliers –
J’avoue que ces 5 séances furent assez sportives, car il fallait tout mettre en place rapidement au début de chaque séance, puis expliquer et accompagner les participants tout en surveillant l’heure (qui passe à une allure folle!) et enfin ranger. Comme le temps était court, il était important de ne pas se lancer dans des explications trop compliquées et aller à l’essentiel en utilisant un vocabulaire simple, compréhensible par tout le monde (chose loin d’être évidente quand on pense couture tout le temps 🙂 ). Cela a donné lieu à pas mal de fou-rire, notamment quand je mélangeais les mots ou quand de mon côté, je voyais leur tête après avoir employé une phrase un peu trop compliquée (j’avais, par exemple, un peu oublié que l’expression « Endroit contre endroit » est une notion totalement floue pour les gens normaux 🙂 ).
Pour m’aider, j’avais également réalisé des pancartes explicatives. Mais finalement elles n’ont pas vraiment servi, si ce n’est au départ, quand j’ai réfléchi aux différents étapes. Par exemple, j’ai fait le choix de ne pas utiliser d’épingles, car quand on débute, il n’est pas forcément simple de bien les positionner. J’ai un peu hésité avant de prendre cette décision. Mais finalement, tout c’est très bien passé, les coutures étant réduites et les tissus peu fuyants. Bien sûr, il y a eu quelques coutures un peu tordues, mais rien de grave.
Il a fallu aussi rester zen, quand à plusieurs reprises, une des machines a commencé à faire des points bizarres. C’est dans ces moments là, que je me rends compte de ma progression en couture. J’ai été capable d’analyser et résoudre les problèmes dans un temps record (pour moi), sans paniquer et sans vouloir balancer ma machine par la fenêtre. Passer mon CAP a certainement joué un rôle dans tout ça. 🙂
Si ces séances ont été prenantes, elles m’ont également permises de voir de biens jolies choses. Tout d’abord, j’ai été étonné par le sens d’observation aigües de mes collègues. Comme indiqué plus haut, les coupons provenaient de chutes d’anciens projets. Alors ce fut assez cocasse, quand l’une de mes collègues a sorti : « Ah mais je le reconnais ce tissu, tu t’es fait une robe avec » et que d’autres ont renchéri derrière « Oui tiens c’est vrai, et celui là, c’est pas ta blouse jaune qui est sur toi par hasard ». Bref, ce fut assez drôle, et cela est devenu presque un jeu entre nous. 🙂 Mais le plus étonnant fut certainement le contraste entre cette peur d’essayer et cette rapidité à comprendre. D’ailleurs, ce fut très sympa de voir que lors des dernières séances, des personnes novices m’aidaient, en expliquant à leur tour comment fonctionnait les machines à coudre. Je tire d’ailleurs mon chapeau, à celle qui a traduit les explications en allemand pour que notre collègue suisse puisse participer. Bref, j’ai des collègues trop balèzes. 😉
A la fin des 5 séances, nous avons eu la jolie surprise de compter 11 lignes de 10 carrés, ce qui était plus que prévu. Je les ai laissé choisir l’ordre d’assemblage des bandes entre elles, chose pas si simple à faire, car chacun avait assemblé les carrés comme il le souhaitait. Mais l’ordre fut très bien choisi, et chaque carré s’est retrouvé avec des voisins différents. 🙂
Par ailleurs, une jolie coïncidence est arrivée à ce moment là : nous venions tout juste de terminer le dernier atelier, quand on nous a annoncé la naissance du petit bout de chou. 🙂
– La création de la couverture –
A ce stade, la couverture était loin d’être terminée (mais je crois qu’à ce moment là, je n’en avais pas vraiment conscience). J’ai cousu les bandes entre elles, en respectant l’ordre donnée par mes collègues. Pour ne pas avoir de décalages trop importants entre les carrés, j’ai tenté de rattraper les coutures un peu tordues, sans les défaire (il était important pour moi, de ne pas toucher au travail de mes collègues). Pour cela, j’ai choisi de réaliser des petits plis à certains endroits.
J’ai ensuite utilisé un molleton thermocollant pour apporter un peu d’épaisseur à la couverture. Puis pour le dos, j’ai utilisé un sweat matelassé d’une jolie couleur bleu paon, trouvé chez Rascol.
Pour que les différentes couches tiennent entre elles, j’ai choisi de faire simple : j’ai réalisé des points à la machine (en enlevant les griffes d’entraînement) en les répartissant à certains angles à intervalles réguliers.
Je ne sais pas si ma méthode est très académique et certaine pro du patchwork vont peut-être bondir en lisant cela. 🙂 Mais j’ai eu un peu peur de gâcher le travail de mes collègues, si je me lançais dans une opération de quilting. Je préfère garder ma première expérience de matelassage pour un projet, qui aura un peu moins de valeur (enfin si un jour, j’ose me lancer dans ce genre d’ouvrage…).
Après plusieurs heures de couture, je suis arrivée à ce résultat : une petite couverture d’environ 1m sur 1m10. Comme les carreaux n’étaient pas tous alignés, j’avais peur que les bords soient un peu biscornues. Mais finalement, ils sont plutôt assez droit.
– Pour finir… –
En écrivant par ici, je me rends compte un peu plus du temps consacré à ce projet. J’étais tellement enthousiaste à l’idée de relever ce défi, que je n’ai pas vraiment fait attention à cela. Mais je ne regrette en rien cette expérience, car même si ce n’est probablement pas le plus parfait de mes projets couture, c’est certainement l’un des plus beaux. 🙂 Il reflète bien la voie que j’aimerai suivre et auquel ce nouveau nom de blog fait écho : utiliser la couture comme un outil, pour partager de bons moments avec des personnes qui m’entourent. Ce type d’expériences est tellement riche en enseignement, et m’apporte bien plus que de coudre dans mon coin. Je me rends compte aussi que j’ai la chance d’avoir un joli entourage professionnel, qui est également assez fou, pour me suivre dans mes lubies couturesques. Et pour cela, je tiens à les remercier d’avoir répondu présent. 🙂
A l’heure où je termine cet article, ce joli cadeau est devant moi, emballé, prêt à rejoindre son petit propriétaire et sa maman. J’avoue que je me suis un peu attachée à cette couverture et n’aurait pas été contre la garder encore un peu. 🙂 Mais je suis certaine qu’elle sera entre de bonnes mains et puis j’avoue, j’ai hâte de voir la tête de ma collègue quand on va lui raconter son histoire. Elle va certainement nous prendre pour des fous, mais tant pis, j’ai tellement aimé réaliser ce projet. D’ailleurs, je ne serai pas contre recommencer, si jamais un(e) des mes collègues veut agrandir sa famille, je suis prête ! 🙂
13 Comments
Add Yours →La couverture est jolie, son histoire encore plus !! J’adore !
Merci beaucoup pour ton message! 🙂
Génialissime cette idée de partager un moment de couture et en faire un cadeau unique pour une collègue ! Bravo !
Oui tout à fait, il a 2 côtés ce projet : partager et faire un cadeau unique. Merci d’être passée par ici 🙂
De rien !
J’adore l’idée de la couverture et le résultat est magnifique ! Très bel article.
Ça donne envie d’en faire une mais je n’ai pas autant de stock de chutes 🙈
Belle découverte que votre blog couture, grâce au gang des blogueuses 😉
Bonjour Audrey, et Merci d’être passée par ici^^ C’est vrai que là j’ai utilisé pas mal de coupons différents, mais une couverture avec moins de carrés différents peut être aussi très sympa à réaliser 😉
C’est adorable!
Merci! 🙂
Oh, mais quelle belle idée ! Je suis certaine que cette couverture aura encore plus de valeur pour elle. Est-ce que les séances de couture ont été photographiées ?
J’ai deux souvenirs un peu similaires : voir mon Papa (qui n’avait jamais touché une aiguille) broder le bord de mon voile de mariée tout un été et… encadrer une douzaine de jeunes filles (guides), toutes débutantes, pour coudre des sacs à linge qu’elle vendaient pour partir en camp au Danemark. Je vais d’ailleurs recommencer sous peu, mais les filles sont plus grandes et ont toutes déjà touché une machine.
Oui, j’ai photographié un peu pdt ces séances, surtout pour avoir des preuves, si jamais ma collègue ne nous avait pas cru 😉 Quelques-unes illustrent d’ailleurs cet articles. Vos souvenirs sont vraiment beaux! Bonne couture à plusieurs! Et merci pour votre mot, qui donne le sourire, surtout qd on rentre d’une journée bien chargée^^
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